Souheila Yacoub : "J'adore travailler en groupe, que chaque voix compte à son échelle"
Formidable aussi bien dans la comédie, récemment dans Making-Of de Cédric Kahn, que dans les séries géo-politiques tendues, avec No Man's Land dont se profile la deuxième saison, l'actrice Souheila Yacoub, ambassadrice de la Maison Dior, sera ce printemps à l'affiche du très attendu Dune 2 pour ses premiers pas dans le grand bain hollywoodien.
Photographie : Emma Panchot
Stylisme : Jennifer Eymère
Que signifie pour vous ce rôle d’ambassadrice de la Maison Dior ?
Je suis heureuse de faire partie d’une maison française prestigieuse et élégante. La mode est depuis toujours assez liée au cinéma, et je suis flattée que cette Maison m’accompagne, de très belles personnes y travaillent. J’étais récemment au défilé au Mexique, c’était fou, j’ai été accueillie comme une reine. J’ai eu la chance de pouvoir échanger un peu avec Maria Grazia Chiuri (directrice artistique de Dior femme depuis 2016, ndlr).
Avez-vous des produits phares ou fétiches ?
Pas vraiment car chaque collection est différente et c’est à chaque fois un immense plaisir de découvrir de nouvelles matières, de nouvelles coupes, avec un savoir-faire exceptionnel. J’aime autant les ensembles et les coupes un peu masculines que les robes couture. J’aime que Dior ait à la fois un côté punk et un côté princesse. Il y en a pour tous les goûts, toutes les morphologies. Dior aime la Femme. Toutes les femmes. L’essentiel étant de se sentir bien et en phase avec le vêtement que l’on porte, et c’est le cas à chaque fois que j’ai la chance de porter les créations de Maria Grazia.
Qu’avez-vous retenu de vos années de compétion en tant que gymnaste ?
La détestation de la compétition, y compris lorsqu’il s’agit d’obtenir un rôle, même s’il me tient à cœur. Les jalousies, les comparaisons me font du mal. Déjà à l’époque, je n’aimais pas ça, je préférais tout ce qui impliquait le collectif. J’adore travailler en groupe, que chaque voix compte à son échelle. Pour le côté plus positif, j’ai appris la ponctualité ! et aussi la tenue du corps, à connaître le mien. J’approche souvent les rôles par le corps, qui a été mon principal outil pendant des années – même si je ne souffre pas du tout autant au cinéma ou au théâtre que ce que j’ai souffert en tant de gymnaste. Dans No Man’s Land, où mon rôle est physique, je retrouve certains réflexes. Je sais aussi gérer le stress, après avoir fait tellement de compétitions de très haut niveau. En 2012, quand j’ai quitté l’équipe nationale suisse, j’ai été approchée par Le Cirque du Soleil, mais comme j’avais quitté ma famile vers l’âge de 12-13 ans pour aller vivre avec l’équipe nationale, je n’avais pas de diplôme, plus d’amis. J’étais dans une bulle, avec cinquante heures de sport par semaine. Mon plaisir du soir, c’était de regarder des making-of et des bêtisiers de tournages. J’étais très malheureuse. Moi à qui on demandait d’être un robot sans expression, de voir ces gens si heureux de faire ce métier, de parler de leurs émotions, me donnait tellement envie… Je devais me réadapter. Ça a été dur. J’ai fait une école de danse en Suisse, et une heure par semaine il y avait un cours de théâtre, j’adorais ça. J’ai compris qu’il fallait que je recommence une nouvelle vie ailleurs, et je suis partie à Paris, à 20 ans. Je n’avais encore rien vécu, vraiment, je n’arrivais pas à imaginer la vie d’après le sport. Une bourse via deux fondations pour aller au Cours Florent, et là j’ai rencontré mes meilleurs amis, et une nouvelle histoire a commencé. Je marchais dans les rues, tout me semblait magique. Je me sentais libre !
Vous avez tourné dans la minisérie Les Sauvages, de Rebecca Zlotowski, et la série No Man’s Land. Est-ce qu’en tant qu’actrice il est plus agréable de développer un personnage sur la durée ?
Dans la première saison de No Man’s Land je n’avais pas le premier rôle, mais je serai plus en avant dans la deuxième (diffusion à venir sur Arte, ndlr), où l’on a plus le temps d’étirer le rôle, de lui apporter plus d’épaisseur, de complexité.
Se prépare-t-on de la même façon pour une comédie, comme Making-Of de Cédric Kahn, que pour le tournage de Dune 2 de Denis Villeneuve ?
Cela n’a rien à voir. J’aimais beaucoup mon personnage dans Making-Of, et j’ai savouré l’opportunité de travailler avec des acteurs que j’admire, comme Jonathan Cohen, un génie de la comédie et de l’impro, ou Denis Podalydès, un acteur extraordinaire. Sur le plateau de Dune 2, j’avais l’impression d’être à DisneyLand ! C’était fascinant, avec que des stars dans leurs domaines, des chefs opérateurs ou ingénieurs du son oscarisés. Lors de mon premier jour de tournage, j’étais face à Timothée Chalamet, Rebecca Ferguson, Javier Bardem et Zendaya… J’avais aussi la pression d’avoir été choisie directement par Denis Villeneuve, sans passer par le casting ou des lectures. Je n’en revenais pas !
Quand vous lisez un scénario, vous cherchez quelque chose qui vous ressemble dans le personnage que l’on vous propose, ou au contraire quelque chose de très éloigné ?
D’aussi loin de moi que possible ! Surtout aujourd’hui. J’ai plein de projets à venir, tous très différents les uns des autres. J’adorerais faire un film d’époque, au Conservatoire j’ai travaillé les plus grands classiques, et j’adore cette langue. J’ai envie d’aller vers des trucs un peu fous, drôles, burlesques, sentimentaux. On m’a déjà vue dans des registres, disons, un peu sociaux, j’ai adoré et ne regrette rien, mais j’ai besoin d’aller là où je ne suis pas attendue. J’ai plus envie de jouer Jeanne d’Arc que Cléopâtre !
Votre compte Instagram est très suivi, vous le gérez comment ?
Comme un outil promotionnel. Les réseaux sociaux aujourd’hui me font peur. Je me sens mieux depuis que j’y vais moins.
Avec le recul, quels sont vos meilleurs souvenirs ?
Au Cours Florent, quand j’ai commencé à travailler des scènes chez moi avec d’autres élèves, je savais que j’étais à ma place. Je viens de réaliser mon premier court-métrage avec une amie, et j’ai adoré cette expérience créative. Et puis aussi quand je suis arrivée sur le plateau de Dune 2, j’étais sidérée par tout, les loges, les hangars avec les milliers de costumes… c’est un métier extraordinaire !
COIFFURE : Rudy Marmet @ CALLMYAGENT
MISE EN BEAUTÉ DIOR : Ruby Mazuel @ CALLMYAGENT
STYLISME : Kenzia Bengel de Vaulx
