6 ballons mythiques de la Coupe du Monde
“Vous pensez qu’un ballon de foot est un ballon de foot et rien qu’un ballon de foot ?”, déclarait le designer britannique Paul Smith. Eh bien détrompez-vous, pourrait-on clamer de concert avec le créateurs fan des Red Devils de Manchester ! Au fil des ans, développement du foot business oblige, le ballon de cuir – désormais fabriqué en matière synthétique – est devenu un objet de pop culture, au même titre que l’iPhone, votre bonne vieille paire de Stan Smith ou le dernier épisode de la saga Star Wars. Qui l’eût cru ? Qui aurait pu penser que 22 joueurs courant derrière un si modeste ustensile sur carré vert seraient observés, scrutés, idolâtrés par des dizaines de millions de téléspectateurs à travers le monde ? Quelques décennies auront ainsi suffi au football pour devenir un pilier de l’entertainment, l’équivalent des jeux du cirque romains. Et puisque ce jeu est devenu une affaire au retentissement international, chaque nouvelle compétition, Coupe du monde en tête, permet désormais aux équipementiers de sortir leurs propres lignes de sportswear et de balles, plus modernes les unes que les autres.
Depuis 1970, sur les terrains, c’est Adidas qui fournit les ballons officiels aux héros en crampons. Avec, pour commencer, un coup de maître : le mythique ballon Telstar blanc et noir pensé pour la diffusion en mondovision. Suffisant pour poser les bases d’un gigantesque commerce. Suivront les Tango, Azteca, Etrusco, Tricolore, Fevernova et autres Jabulani. Autant d’objets à la réputation légendaire et parfois controversée. Autant de ballons vantés pour leur technologie révolutionnaire ou critiqués pour leurs travers rédhibitoires (selon les millésimes, certains seront jugés trop légers, trop lourds, ou suivant des trajectoires jugées aléatoires...). Voilà comment, d’une banale sphère de cuir s’alourdissant au gré des précipitations, nous sommes passés à des ballons truffés de technologie, intégrant des puces offrant accès à une myriade de données. L’industrie du luxe n’est pas en reste. Elle a réinterprété l’objet, lui a offert de nouveaux quartiers de noblesse. Conçu en cuir Venezia et piqué sellier chez Berluti, rayé bayadère chez Paul Smith, et monogrammé chez Louis Vuitton qui le transportera, en Russie, dans une malle spécialement créée pour l’occasion : le ballon a pris du galon.
Le Telstar
Signe distinctif
Attention, ballon mythique ! Objet pop à l’esthétique seventies, le Telstar symbolise la quintessence du ballon de football. Sa nouveauté ? Un design pensé autour de l’alternance de panneaux blancs et noirs en a fait la sphère choyée de Cruyff, Beckenbauer et Pelé.
Caractéristiques
Fabriqué intégralement en cuir, le Telstar est le premier à utiliser la forme géométrique dite de l’icosaèdre tronqué. Il se compose de 32 parties bien distinctes : 12 panneaux noirs pentagonaux et 20 panneaux blancs hexagonaux.
L’anecdote
Tout premier ballon Adidas utilisé lors d’une Coupe du monde, le Telstar de 1970 tient son appellation de l’abréviation “television star”. En pleine conquête de l’espace, il reprend la forme et le design du satellite de télécommunication éponyme, Telstar 1. L’hommage ne s’arrête pas là. Puisque la Coupe du monde se joue désormais en mondovision, le motif blanc et noir du ballon officiel a été pensé pour lui donner une meilleure visibilité sur les téléviseurs d’avant la couleur.
Meilleur Match
21 juin 1970, stade Azteca de Mexico. En finale, devant 107 400 spectateurs, le Brésil de Pelé, Jairzinho et Tostão écœure la sélection italienne et triomphe 4-1. Au-delà du jeu léché des Auriverde, c’est bien la domination sans partage du Brésil sur la planète foot qui épate les observateurs. Grâce à leur maîtrise du dribble, Pelé et ses coéquipiers, triples champions du monde, repartent de Mexico avec le trophée Jules Rimet.
Le Tango
Caractéristiques
Si le design évolue bel et bien, peu de modifications techniques sont à noter. Le Tango est le dernier ballon officiel à être fabriqué en cuir. Une curiosité surannée qui lui confère aujourd’hui encore le statut de star des ventes aux enchères !
L’anecdote
Le Tango connaîtra un grand succès et une longévité exceptionnelle. Il est utilisé tel quel lors du Championnat d’Europe 1980 en Italie, sous le nom de Tango Italia, puis en 1982 pour la Coupe du monde en Espagne, sous le nom de Tango España.
Meilleur Match
25 juin 1978, stade El Monumental de Buenos Aires. En finale, devant 71 483 spectateurs, les PaysBas affrontent le pays hôte, l’Argentine. Quatre ans après leur finale perdue face à la RFA, les Oranje ont faim de victoire. Pourtant, leur atout majeur, le génie Johan Cruyff, a décidé de boycotter le Mondial pour ne pas cautionner la dictature de Videla. Une absence cruelle qui se solde par la victoire 3-1 des Argentins après prolongations. Photos DR Signe diStinctif Après le Telstar, Adidas frappe fort ! Son Tango se révèle à la fois chic, moderne et minimaliste. Des motifs triades apparaissent sur les hexagones. Les pentagones, jadis noirs, sont blancs. Le dessin global donne l’illusion de cercles dessinés sur le ballon.
L'Azteca
Signe distinctif
Pour la première fois, Adidas crée un design en lien avec le pays hôte. C’est ainsi qu’en 1986 apparaît l’Azteca, un ballon au dessin novateur composé de fresques aztèques incluses dans les triades. Une petite coquetterie inaugurant l’ère de la customisation.
Caractéristiques
L’Azteca est le premier ballon entièrement en matériau synthétique. Une avancée qui n’a rien du gadget : face aux contraintes locales (altitude, humidité, terrains secs), cette innovation améliore considérablement le jeu. La balle dispose d’un revêtement anti-usure, couvrant trois autres enveloppes de structures différentes. Le tout pour un modèle plus résistant, plus imperméable et indéformable.
L’anecdote
Le passage au synthétique, est une révolution. Exit les ballons en cuir qui absorbaient la pluie, engendrant une augmentation de masse jusqu’à 25 % supérieure au poids initial ! Et les lésions cervicales des joueurs lorsqu’ils frappent le ballon de la tête disparaissent.
Meilleur Match
22 juin 1986, stade Azteca de Mexico. Devant 114 500 spectateurs, l’Argentine affronte l’Angleterre dans le cadre d’un quart de finale resté dans les mémoires. Quatre ans après la guerre des Malouines, les pays ennemis s’affrontent. Après avoir inscrit un premier but de la main, la fameuse “main de Dieu”, Maradona marque le but du siècle en driblant la défense anglaise depuis le milieu de terrain. Légendaire !
Le Tricolore
Signe distinctif
Tout comme la sympathique mascotte Footix et le crâne dégarni de Zinédine Zidane, Tricolore est devenu un symbole, celui de la France qui gagne ! Premier ballon en couleur de l’histoire de la Coupe du monde, il arborait le bleu-blanc-rouge du drapeau français et porta chance aux hommes d’Aimé Jacquet.
Caractéristiques
À chaque Mondial, son innovation ! Ce modèle s’est montré plus souple et plus rapide que ses prédécesseurs, il utilise une “mousse syntactique” destinée à assurer une meilleure compression ainsi qu’un meilleur rebond. C’est le dernier des ballons dits “classiques”.
L’anecdote
Outre l’introduction des couleurs, Tricolore se distingue par son lieu de fabrication, bien loin du made in France… Tandis que jusqu’en 1994 tous les ballons de la Coupe du monde étaient fabriqués en Europe, Adidas prend ici la décision de le manufacturer au Maroc. Un comble pour cet emblème patriotique !
Meilleur match
12 juillet 1998, Stade de France à Saint-Denis. Devant 80 000 spectateurs, l’équipe de France inscrit trois buts face au Brésil de Ronaldo et remporte son premier Mondial. Les Bleus deviennent de saintes idoles, la consommation repart, comme la natalité. Le temps d’un été, la France se rêve conquérante, fraternelle et métissée.
Le Jabulani
Signe distinctif
À l’occasion du premier Mondial organisé sur le continent africain, l’équipementier Adidas crée une balle aussi révolutionnaire que ludique, le Jabulani (littéralement, être joyeux, en zoulou). Une vraie rupture dans le design et dans la technologie. Selon l’équipementier allemand, le Jabulani est censé être le plus rond de tous les ballons.
Caractéristiques
Le Jabulani profite de la technologie du soudage thermique. Une évolution qui devrait faire toute la différence : le nombre réduit de coutures permet l’assemblage de seulement huit éléments (en lieu et place des 32 pentagones plats des balles classiques). On promet ainsi une meilleure précision, on vante son accroche optimisée ainsi qu’une stabilité améliorée. La réalité sera tout autre et le fiasco au rendez-vous !
L’anecdote
Détesté par les joueurs pour son comportement imprévisible et ses trajectoires aléatoires, le Jabulani restera dans les annales footballistiques pour les mauvaises raisons. C’est ainsi qu’Hugo Lloris, le portier de l’équipe de France, qualifiera le ballon de “catastrophique” et l’icône italienne Gianluigi Buffon “d’absolument inadéquat”.
Meilleur Match
2 juillet 2010, Soccer City de Johannesburg, en Afrique du Sud. En quart de finale, devant quelque 84 000 spectateurs, l’Uruguay élimine l’outsider Ghana au terme d’une partie échevelée. Fait du match : l’exclusion de l’attaquant Suarez qui arrêta le ballon de la main afin qu’il ne franchisse pas la ligne de but.
Telstar 18
Signe distinctif
Hommage au mythique ballon de l’édition 1970, le Telstar 18 a été pensé autour de l’articulation entre héritage et modernité avec la reprise des fameux panneaux blancs et noirs et l’intégration de technologies dernier cri pour le confort de l’utilisateur. Une transition tout en douceur.
Caractéristiques Grande première dans l’histoire de la Coupe du monde, le Telstar 18 est doté d’une puce. qui permet de récupérer de précieuses données via un smartphone ou un ordinateur. Une technologie à laquelle les consommateurs auront aussi droit. Chaque ballon génère en effet un identifiant et débloque des informations destinées à son propriétaire. La balle, promue objet technologique, permet d’améliorer “l’expérience utilisateur”.
L’anecdote
Lancé en grande pompe à l’approche de la Coupe du monde, le ballon a été testé par diverses sélections nationales et certains des plus grands clubs du monde, dont le Real Madrid et Manchester United.
Meilleur match
L’avenir nous le dira.