Comment Chanel est entré dans la danse
N'y-a-t-il donc que les tutus pour habiller les danseuses, comme les queues de pie guindent les instrumentistes ? Uniforme associé à la danse dite "classique", fleuron d'une tradition flirtant avec l'académisme, ce costume est - comme en tout - le nécessaire point de départ d'un renouveau du genre. Virginie Viard s'y attèle donc cette saison, à l'occasion du gala d'ouverture de la saison de la danse au Palais Garnier parrainé, pour la seconde année consécutive, par la maison Chanel. À cerclette, le tutu devient patineuse, taillé dans un tulle de soie poids plume. Les artisans du parurier floral Lemarié y brodent en perles, fils de lurex et pétales de soie six fleurs comme six étoiles : la rose, bien sûr, mais aussi le lys, la tulipe, la glycine, le bleuet et la violette. Les fameuses "Variations" du gala d'ouverture s'articulent autour de ce sextuor, qui dansera du Serge Lifar sur du Schubert.
Offrir au vestiaire de ballets comme à la danse de nouveaux horizons ? Telle est l'ambition partagée de Virginie Viard et d'Aurélie Dupont, directrice de la danse et du ballet à l'Opéra de Paris : "Comme l’Opéra de Paris, la Maison Chanel est une institution, à la fois classique et contemporaine : elle possède un patrimoine incroyable, mais aussi une force, une modernité, une ouverture d’esprit". Karl Lagerfeld aussi l'avait compris, lui qui, pour "La Mort du Cygne" au English National Ballet en 2009, avait créé avec les plumassiers de la Maison Lemarié un tutu en mutation, partiellement couvert de plumes... Bien avant l'époque 2.0, Gabrielle Chanel, déjà, rhabillait les étoiles de Paris pour le ballet "Le Train Bleu" de Jean Cocteau. Cette micro-révolution surfait sur la vague, magistrale, du "Sacre du Printemps", ballet pionnier à l'âge d'or des Ballets Russes... Et ça continue de danser, cent ans après.